Boxtal est un produit qui a été entièrement repensé jusqu’à devenir LA solution des e-commerçants en matière de livraison. Thiphaine Le Roy, à la tête de l’équipe produit, nous raconte l’histoire de cette refonte réussie !
Aujourd’hui nous rencontrons Thiphaine Le Roy, CPO et CMO chez Boxtal, entreprise pionnière de la « shiptech » qui a développé une solution SaaS d’expédition multi-transporteurs pour les entreprises de l’e-commerce. Son parcours, la construction de Boxtal, jusqu’au fonctionnement actuel de l’entreprise, elle nous aide à y voir plus clair.
Qui es-tu et comment es-tu arrivée chez Boxtal ?
Thiphaine Le Roy, je suis arrivée chez Boxtal il y a 2 ans et demi pour monter l’équipe produit et suis devenue CPO/CMO il y a 6 mois maintenant. Avant Boxtal, j’ai passé 7 ans chez SFR, 3 ans en finance côté Business Plan, puis 4 ans côté marketing. J’ai rejoint Boxtal dans la roue de mon manager en 2016, à l’époque c’était encore Envoimoinscher.com et notre produit phare était le comparateur d’offres de transport pour les colis. Ma mission en arrivant : construire une véritable équipe produit et redéfinir la proposition de valeur globale de Boxtal.
Quel a été ton premier chantier ?
Quand j’ai rejoint Boxtal, il était déjà clair que la cible e-commerce était la plus prometteuse en termes de croissance. Une des premières questions qu’on m’a posée à mon arrivée a logiquement été : « quelle est la prochaine plateforme e-commerce à intégrer ? ».
Ma réponse a été un peu en rupture : il ne fallait surtout pas continuer à développer des solutions différentes pour chaque plateforme e-commerce (Amazon, Cdiscount, WooCommerce, etc) mais créer un produit unique pour centraliser toutes les expéditions des marchands. Tout centraliser sur une interface unique était rationnel d’un point de vue développement, maintenance, évolutivité, cohérence de l’expérience client mais aussi d’un point de vue marketing et commercial pour concentrer nos efforts.
En parallèle on travaillait au rebranding d’envoimoinscher.com en Boxtal pour nous repositionner sur le B2B et préparer l’internationalisation. On a donc lancé la refonte complète de nos fronts et le lancement de Boxtal.com. C’était le coup d’envoi du “reboot” de sa transformation en une boîte SaaS B2B de gestion des expéditions.
Notre objectif : transformer le Kayak du colis en Stripe de la livraison.
Et sur quoi travailles-tu en ce moment ?
En ce moment on travaille sur l’enrichissement de notre produit pour les e-commerçants avec de nouvelles fonctionnalités, et côté marketing on développe une nouvelle logique de partenariats avec les acteurs de notre éco-système e-commerce. On a beaucoup de sujets et d’idées, plein de belles choses émergent, ma mission c’est bien sûr de donner la direction mais aussi créer les conditions pour que de nos initiatives se dégage le maximum de valeur.
Après la commande d’un client sur internet l’expérience utilisateur n’est pas finie, c’est là que vous vous positionnez et que vous apportez de la valeur pour l’utilisateur ?
Bien sûr et pas que ! Notre message c’est que la livraison ne doit pas être vue comme une charge ou un problème opérationnel à gérer. C’est un élément clé du marketing mix et de l’expérience client ! Une politique de livraison bien pensée et adaptée à son business c’est un puissant accélérateur de croissance pour les e-commerçants.
Face aux grands groupes (Amazon, Asos, La Redoute…) qui dictent les standards en termes de livraison, ce n’est pas simple d’émerger quand on est une petite structure mais grâce à Boxtal c’est possible.
Notre mission c’est de lever les freins (tarifaires, techniques, opérationnels) pour permettre à nos clients de croître.
Si on parle un peu du cœur du réacteur, comment fait-on tourner tout ça ? Avec ta casquette produit comment as-tu pu monter ces équipes vers cette nouvelle façon d’opérer ?
Quand je suis arrivée il y avait juste une PO qui gérait la roadmap. On a ensuite renforcé l’équipe et il a fallu donner à chacun un périmètre, on a choisi une approche par personae : les e-commerçants vs les expéditeurs plus occasionnels pour que chacun se focalise sur les besoins de son client cible et soit « la voix du client ». Avec l’équipe dev on fonctionnait en mode agile assez classique. Cela tournait bien pour gérer des incréments « simples » mais pour une refonte aussi majeure que celle dans laquelle on s’était embarqués c’était inadapté…
Pour ajouter un peu de piquant, je suis partie en congé maternité en plein milieu du projet de refonte. Tout était cadré d’un point de vue maquettes et attentes fonctionnelles mais il restait un énorme boulot de dev. Quand je suis revenue à M-3 du lancement, l’écart entre la vision de l’état du projet côté dev et opérationnels (notamment marketing) était immense, il était urgent de réaligner tout le monde. L’enjeu était énorme parce que la date de fin de projet était ferme : on avait booké une campagne TV ! Pour y arriver on est passé en mode militaire, rationalisation extrême du besoin pour sécuriser le MVP et to do list hebdo au tableau par développeur, de quoi faire hurler un coach agile. On a tenu la deadline à 3h près, c’était dingue, intense, très dur mais fédérateur pour les équipes. Avec le recul je mesure mieux la difficulté de ce que nous avons entrepris, je me dis maintenant que c’était un peu fou mais sur le moment on était focalisé sur l’objectif on a foncé.
Est-ce que vous avez tiré des enseignements de ce que vous avez fait à ce moment là ?
Un des principaux enseignements que je tire de cette expérience c’est l’importance du focus et de la communication. Au quotidien dans une entreprise beaucoup de choses apportent du « bruit » et on a vite fait de s’éparpiller sur des sujets mineurs ou non urgents mais ce n’est pas facile à entendre pour tous. Pour autant si la direction est claire et bien communiquée, si les arbitrages sont justes et partagés alors on peut avancer sereinement sans générer de frustration.
Quelle organisation avez-vous alors adoptée ?
Côté organisation tech/produit, après cette période intense tout le monde était un peu fatigué et d’accord pour dire que le mode de fonctionnement qu’on avait adopté n’était pas pérenne. Il fallait retrouver de l’autonomie et la nouvelle architecture qui était sorti de terre ouvrait aussi de nouvelles perspectives. On avait tout basculé sur le cloud, découplé le front du back, développé des micro-services… bref on était prêts techniquement et matures côté produit pour basculer en squads, inspirées du célèbre modèle de Spotify. Il y a un peu plus d’un an on a donc découpé les équipes en squads full-stack et autonomes sur leur périmètre fonctionnel avec 3 ou 4 devs et un PM chacune.
Sur une chaîne de production dans laquelle on fait passer un incrément produit vous avez organisé les équipes de manière à ce qu’elles puissent être autonomes de bout en bout ?
Exactement, c’était nouveau et ce n’était pas possible avant car nous n’avions pas l’architecture qui le permettait. On est aussi passé en continuous delivery et chaque squad est indépendante des autres pour ses mises en prod. Quelle fluidité ! Pour moi c’était la révolution.
Comment vous êtes-vous rendu compte qu’il fallait faire ces choix ?
Sur l’organisation en squads c’est une décision commune entre CTO et CPO sur la base des remontées des équipes, et un an plus tard aucun regret ! Cette organisation responsabilise et autonomise les équipes et crée une vraie cohésion au sein de chaque squad.
Ça facilite aussi la communication avec le reste de la boite. Côté architecture Samuel notre CTO et les tech-leads ont rapidement analysé les faiblesses de la plateforme historique et fait les choix stratégiques nécessaires à sa sécurisation et sa scalabilité au service des enjeux produit et business. Pour l’anecdote nous étions finalistes du Challenge Start-Up Architecture of the Year à l’AWS Summit cette année, c’est la reconnaissance de ce que ce travail de fond peut apporter à une entreprise.
Comment arbitrez-vous sur une roadmap et comment envisagez-vous sa construction avec des ambitions techniques, d’expérience client et business ?
Cette année nous avons essayé de nous projeter de manière assez détaillée à 12 mois pour donner de la visibilité à tous même si on sait que l’exercice reste très théorique et une roadmap vie et change. On a commencé par une v0 comex top down sur la base des grands objectifs à atteindre et des jalons clés que nous souhaitions positionner puis nous l’avons transmise aux équipes pour un « reality check ». Elles ont pris cette matière, brainstormé, chiffré, évalué les dépendances pour proposer une v1 ajustée. Bien sûr tout ne collait pas à 100% avec la vision originale mais l’objectif était d’arriver à une version réaliste ayant l’adhésion de tous. Ce travail de co-construction a pris tout le mois de janvier et au 1er février nous savions précisément ce que nous voulions faire, dans quel ordre et dans quel but sur les mois qui venaient. Depuis, nous faisons un point tous les mois pour vérifier que nous sommes toujours dans les clous. Les petits arbitrages sont faits entre produit et dev directement, pour les plus gros ça remonte en comex car cela peut avoir de forts impacts opérationnels.
Donc vous interrogez les équipes pour savoir ce qu’il y a à faire et de quelle manière ?
Oui nous avons beaucoup tenu compte du feedback opérationnel car nous voulions que les équipes se sentent embarquées, croient en leur capacité à délivrer et idéalement dépassent l’objectif plutôt que de se retrouver à courir derrière une deadline arbitraire. Sans écoute on ne part pas sur des bonnes bases.
Nous sommes convaincus que l’excellence opérationnelle est le point d’entrée vers l’injection de valeur dans un produit. Il est inutile de capter de la valeur sans pouvoir la délivrer, vous avez donc travaillé sur cet enjeu ces derniers mois. Maintenant vous vous concentrez davantage sur l’augmentation de la qualité des livrables.
Plus globalement, on travaille en effet sur “l’impact” de nos releases. En continuous delivery on est très souples mais on lance plein de petites choses au fil de l’eau que les gens découvrent parfois par hasard, c’est dommage. La coordination entre l’équipe marketing et l’équipe produit est un facteur clé de succès sur cet aspect.
Pratique avec ta double casquette CPO et CMO ?
Bien sûr le fait d’avoir les deux équipes me permet de travailler sur cet axe de manière plus intense. C’est un peu mon mantra du moment « maximiser l’impact de ce qu’on ship. Je pense que ça passe surtout par une grande préparation très en amont, si cette partie est faite, l’aval roulera tout seul. Le fait de passer en « Impact » team est aussi une piste que j’envisage.
Quels types de KPI suivez-vous ?
Des indicateurs assez classiques d’activité : volumes de commandes, paniers moyens, chiffre d’affaires, commission, repeat, acquisitions…On fait également des analyses par cohorte car même si nous n’avons pas encore d’abonnement à proprement parlé nous avons déjà un comportement utilisateur très proche d’une boite SAAS avec une récurrence d’usage extrêmement forte.
Et pour la mesure de l’expérience client ?
Nous mesurons le NPS (Net Promoter Score) de façon mensuelle sur notre base, je suis aussi de très près les avis clients.
Le défaut du NPS c’est qu’il donne la température mais ne te dit pas où agir.
Tout à fait, c’est par la suite dans l’analyse détaillée que nous regardons les motifs d’insatisfaction et que nous identifions les choses à corriger d’un point de vue opérationnel.
Cela peut aussi nourrir vos enjeux de roadmap et de backlog ?
Oui, toutes les remontées sont utiles ! Pour les centraliser nous avons aussi mis en place “Canny”. Tous les salariés ont un compte et peuvent signaler un bug ou une demande de nouvelle fonctionnalité. Canny est lié à Jira ce qui permet à ceux qui ont remonté le sujet d’être informés automatiquement de sa résolution et en avertir leurs clients. C’est l’effet « waou » garanti. Un très bel exemple de « maximiser l’impact » pour moi.
Faites-vous des événements où l’on peut vous retrouver ?
On organise des petits-déjeuners de l’e-commerce tous les mois dans une ville différente de France avec nos amis de PayPlug et Brainify, le prochain est à Bordeaux. Sinon prochainement, on sera au PrestaShop Day par exemple.
Une dernière question, y’a t’il des lectures que tu recommanderais ?
Côté livre je dirais « les 4 accords toltèques » : un classique que Virginie notre CEO m’avait conseillé de lire il y a quelques mois. Ce n’est pas spécifiquement produit mais pour les PM dont le rôle est si particulier et pivot dans une société je pense que c’est une lecture très intéressante. Sur la partie produit je lis beaucoup d’articles sur le product management sur medium et je regarde les replay des meetups LPC. J’écoute aussi des podcasts plus généralistes sur la growth et l’entrepreneuriat : génération XX, le gratin, growth makers…
Sinon la série Silicon Valley est un must, je recommande 🙂
MERCI THIPHAINE 🙂
Boxtal en quelques chiffres :
- Créée en 2009
- 7 millions d’euros levés en 2016
- 49 salariés
- 15 partenaires transporteurs
- 2 millions de colis envoyés en 2018
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